Impacts actuels et appréhendés pour 2050 des fleurs d’eau de cyanobactéries et des cyanotoxines sur différents organismes fauniques de la Baie Missisquoi et de la réserve écologique de la rivière-aux-brochets

Ce projet de recherche vise à mieux connaître les dynamiques entourant la prolifération des fleurs d’eau de cyanobactéries et des cyanotoxines sous l’effet des changements climatiques. Les résultats permettront d'établir des mesures d'adaptation qui serviront de base solide pour la conservation de la biodiversité.

Détails du projet
Programmation scientifique
Programmation 2014-2019
Thématique(s) et priorité(s)
Écosystèmes et biodiversité
Début et durée
Juillet 2018 • 3 ans
Statut du projet
Terminé
 
Responsable(s) scientifique(s)
Philippe Juneau
Université du Québec à Montréal
Beatrix Beisner
Université du Québec à Montréal

Contexte

La Baie Missisquoi et la réserve écologique de la Rivière-aux-Brochets abritent une grande diversité d’espèces fauniques et floristiques. Quelques-unes d'entre elles ont d'ailleurs un statut légal de protection.

Des éclosions de cyanobactéries et des concentrations de cyanotoxines importantes en ces lieux font craindre une augmentation d’impacts négatifs à court ou à long terme. Les observations sur la qualité de l’eau du bassin versant de la Baie Missisquoi démontrent que la présence de phosphate ne peut expliquer à elle seule les évènements plus importants de proliférations de cyanobactéries.

Ce projet projet propose d'étudier si les impacts des changements climatiques pourraient participer à la problématique des cyanobactéries et des cyanotoxines.

 

Crédit photo : Jade Dormoy-Boulanger

Objectifs

  • Étudier la dynamique des cyanobactéries et leurs conséquences potentielles sur le réseau trophique aquatique en analysant la composition et les concentrations en cyanotoxines dans l’eau, les sédiments et le poisson;

  • Évaluer l’impact des changements climatiques sur la problématique des évènements de prolifération de cyanobactéries

  • Évaluer l’impact de la température et de l’atrazine sur des espèces de phytoplancton isolées de la Rivière aux Brochets.

  • Proposer des recommandations au MELCC et MFFP pour qu’ils puissent potentiellement modifier leurs méthodes de gestion et de suivi afin de les adapter aux changements attendus.

Méthodologie

  • Suivi bimensuel, d'août 2018 à octobre 2018 et 2019, de l’abondance des genres dominants de cyanobactéries et des cyanotoxines, de l’azote et phosphore total, de la salinité, du pH, des vents à trois sites sur la Rivière-aux-Brochets et suivi journalier du débit, de la température de l'air et des précipitations.

  • Récolte de poissons (71 spécimens – 10 espèces), extraction et dosage de quinze cyanotoxines.

  • Isolation et culture en laboratoire de cinq espèces de phytoplancton retrouvées dans la RB.

  • Effectuer une revue de littérature sur les principaux facteurs qui influencent l'apparition des fleurs d'eau et leur toxicité.

  • Modélisation de la température de l’eau et faire des projections sur 50 ans.

  • Développer un modèle statistique prédictif pour estimer la tendance de la dynamique des fleurs d'eau de cyanobactérie pour la portion de la rivière qui traverse la réserve écologique de la Rivière-aux-Brochets et le coupler au scénario d'évolution future de la température de l'eau pour faire des projections à 50 ans.

  • Évaluation, en laboratoire, de l’efficacité photosynthétique du phytoplancton lorsque la température de l’eau varie et en présence d’herbicides.

  • Tests de toxicité en laboratoire de pesticides sur le zooplancton.

Résultats

Les échantillons d’eau collectés d’août à octobre 2018 contenaient une variété de 15 cyanotoxines. Dans l’eau, la somme des concentrations de microcystines ciblées atteignait 1–7 μg L-1 à la mi-septembre et revenait sous la limite de détection à la fin -octobre (<LOD de ~0.05 μg L-1). Les sédiments récoltés contenaient des concentrations en cyanotoxines de l’ordre de 1.3 ng/kg à 2982 ng/kg. Anabaenopetines A&B étaient les plus abondantes, tandis que l’homoanatoxine-a était présente dans 8 des 14 échantillons et que l’anatoxine-a seulement dans un échantillon. Au moins une des cyanotoxines étudiées a été détectée dans 38% des muscles de poissons échantillonnés et 17% des échantillons contenait au moins une microcystine.

La composition des cyanobactéries de la Rivière aux Brochets varie grandement au cours du temps et entre les sites. Les scénarios climatiques associés à la plus importante croissance dans des concentrations de gaz à effet de serre (RCP 8.5) projettent une augmentation significative de la biomasse de cyanobactérie à l’horizon 2050 par rapport à 2018-2019. En moyenne, nous estimons que la concentration de chlorophylle a, et donc la biomasse en cyanobactéries, pourrait augmenter d’un maximum de 30% au cours des 50 prochaines années dans la Rivière aux Brochets. Les chercheurs indiquent toutefois qu'il s'agit d'estimations prudentes des impacts potentiels des changements climatiques sur la dynamique des algues car les années couvertes par l'étude n’ont pas été marquées par d’imposantes efflorescences cyanobactériennes dans la rivière aux Brochets comparativement aux années précédentes. 

Figure 1 cyanobactéries 2050

Figure 1 : Projections saisonnières et annuelles de la concentration de chla (A) pour les 50 prochaines années basé sur un scénario climatique associé au RCP 8.5 et en utilisant les variations de température projetées (B). Les points plus foncés représentent le milieu de l’été (fin juillet / début août) et les points plus clairs représentent l’automne (fin octobre).

Parmi les trois espèces isolées (une algue verte et deux cyanobactéries : Chlamydomonas globosa, Dolichospermum flos-aquae et Microcystis aeruginosa), lorsqu’une variation jour-nuit est induite dans la température de croissance, la photosynthèse n’est généralement pas affectée grandement. Par contre, les différents scénarios de température étudiés influencent la toxicité de l’atrazine (herbicide retrouvé fréquemment dans les cours d’eau des régions agricoles comme la Rivière aux Brochets) Ceci indique que la présence d’atrazine pourrait favoriser la dominance de M. aeruginosa dans un environnement naturel agricole lorsque des variations de température jours/nuit se produisent.

 

Retombées pour l'adaptation

Retombées pour l'adaptation

Le modèle sur l’évolution de la température de l’eau développé dans le cadre de ce projet est une avancée dans la prédiction des effets des changements climatiques sur la prolifération du phytoplancton puisque la température est l’une des variables importantes qui influencent l’abondance des cyanobactéries. 

Le projet a permis de formuler plusieurs recommandations au MELCC et au MFFP pour ajuster leurs méthodes de gestion et de suivi des cyanobactéries et des cyanotoxines au regard des changements attendus (par ex. inclure l'analyse de l'accumulation des cyanotoxines dans les poissons et les sédiments et des analyses non spécifiques à l'aide de techniques de spectrométrie de masse à haute résolution dans les efforts de surveillance, revoir les critères de qualité de l'eau pour différents contaminants en considérant la température moyenne de l'eau et ses variations).

Publications scientifiques

Date
Titre
Auteur
Type de document
Langue(s)
2021
Impacts actuels et appréhendés pour 2050 des fleurs d'eau de cyanobactéries (CYANO) et des…
Juneau, P., Beisner, B., Gregory-Eaves, I., Sauvé…
Français
2023
Effet combiné de la température et d'une contamination à une formulation commerciale d'atrazine sur…
Blanchard, A.
Français

Financeur(s)

Autres participants

  • Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC)

  • Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP)

  • ATRAPP (Prévision, prévention et traitement des proliférations d'algues et évaluation des risques y afférents grâce à la génomique)

  • Conseil national de recherches Canada

Projets connexes

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