Précipitations extrêmes et lois d'échelle: impacts des cycles climatiques et de la variabilité naturelle du climat

Cette étude confirme que l’utilisation des lois d’échelle permet une meilleure caractérisation des précipitations extrêmes. Leur mise en place permettra de mieux tirer parti des données observationnelles disponibles et ainsi mieux caractériser le climat historique, particulièrement aux résolutions temporelles et spatiales non couvertes par les données observées.

Détails du projet
Programmation scientifique
Programmation 2014-2019
Thématique(s) et priorité(s)
Simulations et analyses climatiques
Début et durée
Avril 2015 - Décembre 2018
Statut du projet
Terminé
Anne Frigon
Ouranos
Alain Mailhot
INRS

Contexte

Les précipitations extrêmes représentent un aléa météorologique majeur dont les impacts peuvent être très importants sur les infrastructures et les communautés. Leur suivi et leur caractérisation est donc essentiel pour de nombreuses applications, telles que le dimensionnement d’ouvrages hydrauliques et la gestion des ressources. La caractérisation de ce type d’événements aux échelles spatio-temporelles pertinentes aux applications hydrologiques demeure cependant difficile compte tenu de la faible densité des réseaux météorologiques, les courts historiques disponibles ainsi que la résolution spatio-temporelle actuelle des modèles climatiques.

Plusieurs études ont montré l’existence de relations simples, appelées lois d’échelle, permettant de relier les caractéristiques statistiques des précipitations extrêmes à différentes échelles spatiales et temporelles. Ces relations permettent ainsi de déterminer les caractéristiques des précipitations à fines échelles à partir des caractéristiques à des échelles plus grossières, pour lesquelles les données climatiques sont disponibles.

 

Objectif(s)

  • Confirmer l’existence de lois d’échelle à partir de plusieurs ensembles de données disponibles à résolutions spatiales et temporelles différentes.

  • Étudier l’évolution de ces lois d’échelle en climat futur et déterminer l’évolution future des extrêmes de précipitation à différentes échelles spatio-temporelles.

 

Démarche

  • Vérification de l’existence des lois d’échelle et multi-échelles sur les différents ensembles de données pour le territoire nord-américain;

  • Identification des distributions à utiliser pour l’estimation des intensités des précipitations extrêmes;

  • Comparaison des estimations obtenues pour les séries provenant des modèles numériques avec celles de séries observées;

  • Comparaison des lois d’échelle simulées en période future à celles en période historique à partir de projections climatiques régionales.

 

Résultats

Le premier objectif visait à valider l’existence des lois d’échelle pour la description des propriétés statistiques des Maxima Annuels (MA) de précipitation sur une grande partie de l’Amérique du Nord, en utilisant le plus grand nombre de séries de précipitations mesurées à des stations météorologiques (environ 2 700 stations). La validité des lois d’échelle temporelle a été confirmée pour une vaste gamme de durées entre 15 min et 7 jours. La possibilité de construire des courbes Intensité-Durée-Fréquence (IDF), basées sur l’hypothèse d’invariance d’échelle a été évaluée, en considérant les performances des lois d’échelle à approximer les quantiles extrêmes des distributions de probabilité des MA. Finalement, l’analyse spatiale à travers le domaine a montré que ces lois d’échelle (par leur paramètres) sont influencées par les caractéristiques géographiques et climatiques locales, soulignant l’importance de les considérer dans l’estimation des paramètres des courbes IDF.

Le second objectif visait à investiguer les lois d’échelle à partir de différents ensembles de données : données satellites, ensemble obtenu par interpolation de données de multiples sources (satellites, stations et réanalyses), simulation d’un modèle régional de climat à haute résolution (4 km), et simulations du grand ensemble (50 membres) du Modèle régional canadien du climat (MRCC5-LE) (Leduc et al. 2019). La validité de l’invariance d’échelle des précipitations extrêmes a ainsi été vérifiée pour ces ensembles de données sur grille, tant observés que simulés, et a permis de déterminer l’influence de certaines caractéristiques de ces données (p. ex. résolution temporelle) sur la représentation de la structure spatio-temporelle des précipitations extrêmes. Les lois d’échelle ont été comparées à différentes échelles d’agrégation spatiale, ce qui a permis de définir un modèle des lois d’échelle spatio-temporelle reliant les quantiles des distributions de probabilité des MA de précipitations sur une vaste gamme d’échelles spatio-temporelles. Cette relation rend possible l’estimation des courbes IDF et les coefficients d’abattement spatial (ARF) à des sites où aucune station météorologique n’est disponible.

Le troisième objectif a permis d’évaluer l’évolution future des propriétés des MA de durées 1 à 72 heures à partir des séries simulées par MRCC5-LE sur la période 1950-2100 (RCP 8.5). Ainsi, les séries des 50 membres du MRCC5-LE ont été combinées sur de courtes périodes de temps (périodes de 3 à 7 ans), générant des échantillons suffisants pour investiguer l‘évolution des événements très rares et plus extrêmes (p. ex. période de retour 100 ans). Les résultats montrent une augmentation très importante des MA pour tout le domaine de simulation entre 1950 et 2100.

Figure 1

Figure 1 : Changements relatifs médians projetés (%/décennie) en fonction de la durée pour le Nord-est de l’Amérique du Nord pour les périodes de retour 2 ans (rouge), 25 ans (bleu) et 100 ans (vert).

Ainsi, les MA les plus extrêmes (période de retour plus élevées) et les plus courts (1 h) seront plus affectés par les changements climatiques (figure 1). Les conséquences de ces augmentations seront donc majeures si elles ne sont pas prises en compte dans la conception des ouvrages hydrauliques. Les analyses ont également permis de montrer que le cycle annuel sera affecté par les CC. Ainsi, les MA 24 heures seront susceptibles de survenir plus tôt dans l’année (figure 2).

Figure 2

Figure 2 : Distribution aux points de grille du domaine de simulation du MRCC5-LE des dates moyennes d’occurrence des MA 24 heures (cycle annuel) en fonction des années. La zone en bleu correspond à l’intervalle interquartiles (25-75%) et la ligne noire à la médiane.

Publications scientifiques

Date
Titre
Auteur
Type de document
Langue(s)
2019
Observed and Simulated Precipitation over Northeastern North America: How Do Daily and Subdaily…
Innocenti S. et al
Anglais
2019
Projected Changes in the Probability Distributions, Seasonality, and Spatiotemporal Scaling of…
Innocenti S. et al
Anglais
2017
Simple scaling of extreme precipitations in North America. Hydrology and Earth System Sciences …
Innocenti S. et al
Anglais

Retombées pour l'adaptation

Retombées pour l'adaptation

Cette étude confirme que l’utilisation des lois d’échelle permet une meilleure caractérisation des précipitations extrêmes. Leur mise en place permettra de mieux tirer parti des données observationnelles disponibles et ainsi mieux caractériser le climat historique, particulièrement aux résolutions temporelles et spatiales non couvertes par les données observées.

Les résultats de cette étude confirment que les précipitations extrêmes seront plus intenses en climat futur et montrent ainsi l’urgence de majorer dès maintenant les critères de conception des ouvrages et infrastructures hydrauliques qui seront en place au cours des décennies à venir. La présente étude propose également des valeurs pouvant servir de majorations à appliquer.

Financeur(s)

Le MRCC5 a été développé par le centre ESCER de l’UQAM, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada

Autres participants

  • Environnement et Changement climatique Canada (ECCC)

Projets connexes

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