Alors que les hivers québécois se réchauffent et deviennent plus imprévisibles, c’est tout un pan de notre identité nordique qui se retrouve bousculé. Ski, patinage, pêche blanche, grands festivals : des activités emblématiques qui dépendent d’un équilibre fragile, aujourd’hui remis en question par les changements climatiques. Mais loin d’annoncer la fin de l’hiver, ces transformations forcent le secteur touristique à se réinventer — et à imaginer dès maintenant comment continuer de faire rayonner nos hivers de demain.
Quand le climat bouleverse nos activités hivernales
Les activités hivernales, directement liées aux conditions météorologiques, ressentent déjà les effets des changements climatiques. Les sports de glisse, comme le ski ou le patinage souffrent d’hivers plus courts et imprévisibles. D’autres activités emblématiques - pêche blanche, Carnaval de Québec, Montréal en lumière, Bal de neige dans l’Outaouais- subissent elles aussi les contrecoups d’une saison de plus en plus variable.
Les périodes de grands froids suivis rapidement d’une augmentation des températures au-dessus de 0 °C forcent l’annulation des activités, rendant les patinoires et pistes de ski de fond impraticables.
La hausse des températures raccourcit la saison hivernale. Les stations de ski voient leur saison réduite par le manque de neige, tandis que la pêche blanche commence plus tard et se termine plus tôt, en raison d’une glace qui se forme tardivement et devient instable plus vite.
Ces impacts affectent l’expérience client et l’attractivité de l’offre touristique, compliquent la planification des activités et augmentent les risques financiers des organisations. Celles-ci doivent désormais composer avec cette nouvelle réalité climatique tout en anticipant les défis que poseront les hivers de demain.
À quoi s’attendre des hivers de demain ?
Les données scientifiques sont sans équivoque : les hivers québécois se transforment rapidement. Selon les projections climatiques pessimistes, les températures moyennes hivernales augmenteront pour l’ensemble du Québec d’environ +3,9 °C d’ici 2050, puis jusqu’à +6,6 °C d’ici 2080, par rapport à la période de référence de 1991-2020.
Cette hausse des températures se traduira notamment par des hivers plus doux et pluvieux ainsi que des saisons de neige et d’englacement des cours d’eau plus courtes. Pour les régions situées dans le sud de la province, le couvert de neige continu pourrait s’installer neuf jours plus tard et se terminer dix jours plus tôt à l’horizon 2041-2070.
Même si ces constats sont préoccupants, l’hiver québécois ne disparaîtra pas. Épisodes de froids et tempêtes de neige resteront au rendez-vous. Selon une récente étude parue dans le Journal of Geophysical Research, les chutes de neige annuelles diminueront dans la majeure partie de l’est de l’Amérique du Nord, mais les tempêtes majeures continueront de survenir. Certaines régions connaîtront même une augmentation annuelle des chutes de neige lors de quelques tempêtes majeures.
Cette réalité climatique nous invite à faire preuve de flexibilité et de résilience pour adapter nos activités et nos habitudes afin de profiter des joies de l’hiver et être au rendez-vous lorsque la neige est présente.

Une étude portant sur le portrait des indices de neige au sol réalisée pour l’Association des stations de ski du Québec (ASSQ) a permis d’obtenir une vision du comportement de la neige au sol en climat futur sur l’ensemble du Québec.
Adapter pour attirer : comment l’hiver d’aujourd’hui et de demain devient un levier stratégique

Malgré les défis bien réels que posent les changements climatiques sur la pratique d’activités hivernales, l’hiver québécois attire encore de nombreux visiteurs. Il dynamise l’économie et fait rayonner le Québec comme destination hivernale.
Plusieurs solutions d’adaptation ont déjà été mises en place par les acteurs touristiques pour préserver l’attractivité. On retrouve entre autres :
- la création de sentiers multifonctionnels adaptés aux randonnées en raquette ou en fatbike;
- la pratique de la pêche blanche sécurisée grâce à un système d’alerte en temps réel via une application mobile;
- la conception d’installations résistantes aux redoux pour maintenir les activités lors de festivals.
Certaines régions misent également sur la diversification de leur offre pour permettre la pratique d’activités quelles que soient les conditions météorologiques. Elles misent aussi sur des expériences distinctives comme les spas nordiques et les hébergements insolites pour renforcer l’attrait de leur destination.
Face aux changements climatiques, l’adaptation du secteur touristique repose d’abord sur la mobilisation collective. Comme le souligne Laurence Coulombe, coordonnatrice de la programmation scientifique d’Ouranos : « Accompagner les associations et organisations touristiques dans leurs démarches d’adaptation, et leur offrir des outils concrets, est un levier essentiel pour renforcer la résilience du secteur. »
Depuis plusieurs années, Ouranos soutient cette transition et encourage l’adoption de pratiques adaptées au climat de demain. Cet accompagnement montre la capacité des acteurs touristiques à unir leurs efforts pour préserver l’attractivité, la sécurité et la viabilité de leurs activités malgré les défis climatiques.